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Le nouvel instrument de garantie proposé par BPIfrance pour accélérer la conclusion des Corporate PPA

Article Corporate - M&A Financement | 24/11/22 | 7 min. | Leïla Hubeaut Ergen Ege Ludovic de Talancé

Energie Infrastructures

Dans un communiqué de presse du 10 novembre 2022, les ministres Bruno Le Maire, Agnès Pannier-Runacher, et Roland Lescure, ont annoncé le lancement d’un fonds de garantie mis en place par la BPIfrance à partir de l’année 2023 afin d’encourager la conclusion de contrats de long terme d’approvisionnement en électricité « PPA »), basés sur les énergies renouvelables au bénéfice des industriels[1].

C’est une excellente nouvelle qui devrait permettre l’accélération la conclusion des PPA, instruments utiles pour répondre aux enjeux de la transition énergétique. Reste toutefois à clarifier certains mécanismes de mise en œuvre de la garantie.

  1. Les PPA et la transition énergétique
Le PPA, est le contrat central de tout projet de production indépendante d’électricité.

Ces contrats, qui s’exécutent sur des durées longues allant de 10 à 25 ans, sont conclus entre d’une part, un énergéticien qui développe, finance, construit et exploite l’unité de production d’électricité et d’autre part, un ou plusieurs clients, généralement des industriels, qui s’engagent à enlever l'énergie produite pour les besoins de leur consommation, généralement de l’électricité, mais également d’autres sources d’énergie, comme la vapeur.

Les PPA permettent ainsi la construction de centrales au bénéfice d’un ou plusieurs clients (centrales dites « captives ») à même de répondre en tout ou partie aux besoins en énergie des industriels ou des datacenters dont les consommations en électricité sont très conséquentes. Si ces contrats peuvent être basés sur n’importe quelle source d’énergie, les nouveaux clients considèrent les sources d’énergies renouvelables au regard des enjeux climatiques.

Courants en Amérique du Nord et de plus en plus utilisés pour des projets industriels situés dans des pays émergents, les PPA connaissent aujourd'hui une croissance importante en Europe.

Or, la France faisait jusque-ici plutôt figure d’exception, notamment en raison d’un coût de l’électricité historiquement bas et une disponibilité élevée du réseau national.

Cela est néanmoins appelé à changer, notamment en raison de la baisse des coûts de production de l'énergie verte, de la volatilité actuelle des coûts de l’énergie et d’une disponibilité en baisse, mais surtout en raison de la montée en puissance irréversible des enjeux de la transition énergétique, qui imposent de développer des sources d’énergies renouvelables pour répondre aux besoins des industriels.

Les PPA représentent ainsi l’un des outils permettant de contribuer à la décarbonation de l’économie. A ce titre, ils s’insèrent donc dans la stratégie identifiée par le rapport de février 2021 à destination du Conseil général de l’économie[2] .

Il convient alors d’identifier les principaux freins à leur conclusion afin de favoriser leur développement. C’est l’objectif visé par les pouvoirs publics avec la mise en place de ce fonds de garantie porté par la BPIfrance.

  1. L’intérêt du nouveau mécanisme de garantie mis en place par la BPIfrance

Dans le cadre d’un PPA, l’un des principaux risques concerne le cas de défaut de l’acheteur, également appelé l’Offtaker. En effet, toute l’économie du contrat repose sur les flux financiers qui seront versés par ce dernier contre l’enlèvement l’électricité, engagement ferme de l’Offtaker (take-or-pay) afin d’assurer le remboursement de la dette et le retour sur investissement de l’énergéticien.

L’investissement initial conséquent de l’énergéticien pour la construction de la centrale ainsi que son amortissement sur une longue durée repose donc sur la capacité de l’industriel à répondre à ses engagements sur le long terme. C’est un point qui sera scruté de près par les prêteurs, qui chercheront à s’assurer de la bancabilité du projet pour pouvoir mettre en place financement sans ou avec recours limité. Un PPA n’est en effet pas un contrat de fourniture classique, mais s’inscrit plutôt dans des mécaniques de partenariat industriel, du fait de sa durée et de ses équilibres financiers.

En cas de défaut des parties ou de tout évènement qui peut perturber l’exécution normale du contrat dans la durée, comme des cas de force majeure ou encore des modifications législatives, les mécanismes contractuels qui seront habituellement requis par les prêteurs pour mettre en place un financement sans recours, peuvent s’avérer problématiques dans une relation entre deux entités privées.

En effet, dans les PPA conclus avec les acteurs publics, le montage contractuel étant souvent basé sur le schéma BOT (build, operate and transfer), le principe de cession de l’unité de production à ce dernier au terme normal mais également en cas de résiliation anticipé du PPA permet une allocation des risques plus équilibrée pour l’énergéticien. Or, dans le cas d’un PPA avec un acteur privé qui ne souhaite pas acquérir l’actif, de tels mécanismes peuvent s’avérer inadaptés et déséquilibrés.

Un risque important repose donc sur l’énergéticien, qui entre nécessairement en compte dans sa prise de décision d’investissement et surtout pour pouvoir lever la dette afin de financer le projet. Or, le fonds de garantie qui sera mis en place par la BPIfrance semble avoir pour objectif de couvrir certains de ces risques, notamment celui de défaut de l’Offtaker.

Concrètement, la garantie sera liée à un contrat de PPA et serait exercée lors d’un l’éventuel défaut de paiement de l’Offtaker afin d’indemniser l’énergéticien. Les modalités pratiques de cette garantie devraient être précisées dans les semaines à venir, en particulier le montant de l’indemnisation à verser, les cas de défaut potentiel, l’articulation avec les autres sûretés qui peuvent être consenties au profit des prêteurs.

Cette garantie, qui vise avant tout à développer les financements privés, sera payante pour les producteurs et les industriels, et le prix devrait dépendre des modalités du PPA sous-jacent.

Le mécanisme pourrait s’apparenter à une assurance plutôt qu’à un mécanisme de garantie. Les conditions de sa mise en œuvre devraient être simples et non assujetties à des nombreuses démarches ou approbations afin de pouvoir être aussi efficace qu’une garantie à première demande. Par ailleurs, son coût devrait être abordable pour les plus petits projets.

Le dispositif concerne toutes les énergies renouvelables électriques et sera opéré par BPIfrance afin de garantir des premiers contrats à partir de 2023. Le fonds de garantie devrait être doté d’une enveloppe initiale d’environ 70 millions d’euros et pourrait prendre en charge jusqu’à 500 MW de puissance installée cumulée, ce qui permettrait de garantir de nombreux projets de centrales captives.

Si certaines modalités pratiques doivent encore être précisées, le programme de garantie de la BPIfrance est une étape importante en vue du développement des PPA.  Il devrait en outre se combiner avec d’autres mesures incitatives à venir dans la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, dont le projet est en cours de discussion au Parlement[3].
 

[1] https://presse.economie.gouv.fr/10112022-mise-en-oeuvre-dun-fonds-garantissant-les-contrats-dapprovisionnement-de-long-terme-pour-des-industriels-lorsquils-sont-adosses-a-des-installations-renouvelables/

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