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​Le conseil d'état annule la doctrine administrative relative à l'application (...)

Article Private Equity Gestion patrimoniale Droit fiscal | 03/06/16 | 6 min. | Xavier Rohmer

Le conseil d'état annule la doctrine administrative relative à l'application des abattements pour durée de détention aux moins-values mobilières.
Dans sa décision du 12 novembre dernier, le Conseil d’Etat annule pour excès de pouvoir la doctrine de l’administration fiscale relative aux « moins-values » en matière d’application du mécanisme d’abattement pour durée de détention et prescrit une nouvelle méthode de calcul du gain net de cession de valeurs mobilières par les particuliers.[1]

1. Rappel des règles d’imposition des gains nets de cession de valeurs mobilières par des particuliers

Depuis la loi de finances pour 2013[2], les plus-values sur valeurs mobilières réalisées par les particuliers ne bénéficient plus d’une imposition forfaitaire mais sont en principe soumises au barème de l’IR après application d’un abattement pour durée de détention, aux prélèvements sociaux (au taux de 15.5% aujourd’hui) et le cas échéant à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (de 3 ou 4%).

L’article 17 de la loi de finances pour 2014 a généralisé le mécanisme de l’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières selon le barème de l’IR après application d’un abattement pour durée de détention de droit commun de 50% pour une détention de plus de 2 ans, et de 65% au-delà de 8 ans. Ce dispositif a été appliqué aux gains nets réalisés et aux distributions perçues à compter du 1er janvier 2013, sauf pour quelques exceptions.

L’administration a ensuite publié son interprétation de ce texte dans le BOFIP :

  • - « Cet abattement s’applique aux gains nets (plus-values et moins-values) de cession à titre onéreux réalisés à compter du 1er janvier 2103 »[3] ;
  • - « Le montant de la moins-value imputable ou le cas échéant reportable est le montant de la moins-value constatée réduit des abattements prévus au 1 de l’article 150-0 D du CGI »[4].

Dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir formulé à l’encontre de ces instructions, le Conseil d’Etat vient de juger que « les motset moins-values” […] ne se bornent pas à expliciter la loi mais y ajoutent des dispositions nouvelles qu’aucun texte ne les autorisait à édicter », et a annulé en conséquence les points des instructions étendant le dispositif d’abattement pour durée de détention aux moins-values.

2. Conséquences de l’annulation de l’extension des abattements pour durée de détention aux moins-values par l’administration fiscale

L’annulation de la position de l’administration fiscale concernant l’application des abattements pour durée de détention aux moins-values devrait permettre à certains contribuables d’introduire une réclamation afin d’obtenir la restitution d’une partie des impôts sur les plus-values, des prélèvements sociaux, et éventuellement de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus qu’ils ont acquittés.

Les contribuables concernés sont ceux qui auraient imputé des moins-values à raison de la cession de valeurs mobilières détenus depuis plus de deux ans sur des plus-values de même nature et ceux qui auraient réalisé des moins-values reportables frappées par un abattement pour durée de détention au cours des années considérées.

  1. 3. Nouvelle méthode de détermination du gain net imposable proposée par le Conseil d’Etat

- Méthodologie issue de la doctrine de l’administration fiscale

L’application de la méthode indiquée par l’administration conduit à déterminer le gain net imposable au titre des années 2013 et 2014 par compensation entre les plus-values nettes déterminées après application des abattements pour durée de détention et les moins-values nettes déterminées après application des mêmes abattements.[5]

Ainsi, l’application de la doctrine administrative conduisait par exemple à compenser une plus-value de 100 réalisée lors de la cession de titres détenus depuis 3 ans (abattement de 50% au-delà de 2 ans de détention) avec une moins-value de 50 réalisée sur des titres détenus depuis moins de 2 ans. Le gain net imposable était alors nul. En revanche, les prélèvements sociaux étaient dus sur la plus-value avant abattement (100), sans imputation préalable de la moins-value.

- Nouvelle méthodologie indiquée par le Conseil d’Etat

Dans l’arrêt cité, le Conseil d’Etat définit une nouvelle méthodologie de détermination du gain net imposable.

Selon cette méthode, la détermination du gain net imposable implique tout d’abord (i) l’imputation sur les différentes plus-values réalisées des moins-values de même nature que le contribuable a subies au cours de la même année ou qui sont reportées en application du 11 de l’article 150-0 D, pour le montant et sur les plus-values de son choix, puis (ii) l’application de l’abattement pour durée de détention au solde ainsi obtenu en fonction de la durée de détention des titres dont la cession a fait apparaître une plus-value sur laquelle aucune moins-value n’aura été imputée.

L’application de cette méthodologie pourrait dans certains cas être plus défavorable que la règle antérieure issue de la doctrine administrative annulée par le Conseil d’Etat. Par exemple, dans l’exemple précédent, l’imputation de la moins-value (50) se ferait directement sur le montant de la plus-value (100) avant application des abattements. Le gain net serait alors égal à 50, et après application de l’abattement pour durée de détention de droit commun (50% au-delà de 2 ans de détention), le gain net imposable serait égal à 25. Désormais, le taux d’abattement sera déterminé en fonction de la durée de détention des titres générant des plus-values (sans prise en compte des pertes).

***

Les contribuables qui auraient réalisé des cessions de valeurs mobilières entrant dans le champ d’application de l’article 150-0 D du CGI avec imputation de moins-values en 2013 ou 2014 ont donc intérêt à réaliser un nouveau calcul des gains nets imposables par application de la méthodologie indiquée par le Conseil d’Etat, et introduire le cas échéant une réclamation auprès de l’administration fiscale afin de récupérer le trop versé. Les contribuables ont jusqu’au 31 décembre 2016 pour introduire les réclamations concernant les plus-values réalisées en 2013, et jusqu’au 31 décembre 2017 pour les plus-values réalisées en 2014.

Xavier Rohmer, associé

Pauline Radovitch, avocat


[1] CE, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 12 novembre 2015, n° 390265

[2] Article 10 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012

[3] BOI-RPPM-PVBMI-20-20-10 n°1 – 14/10/2014

[4] BOI-RPPM-PVBMI-20-10-40 n°80 – 14/10/2014

[5] Déclaration des revenus 2014 - Brochure pratique 2015 (DGFIP)

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