
Article IT et données personnelles | 24/06/25 | 3 min. | Mahasti Razavi Eden Gall Benjamin Fontani
Annoncé pour le 2 mai 2025, le quatrième et dernier projet du code de bonnes pratiques relatif à l’intelligence artificielle à usage général, n'a toujours pas été publié.
Conformément à l’article 56 du Règlement (UE) 2024/1689 sur l’intelligence artificielle (« RIA »), un code de bonnes pratiques non contraignant, dont la rédaction a été confiée à un panel multipartite d'experts soutenu par le Bureau de l’IA, devait être publié au plus tard le 2 mai 2025. Destiné à guider les fournisseurs de modèles d’intelligence artificielle à usage général dans la mise en œuvre de leurs nouvelles obligations découlant du RIA, le code de bonnes pratiques doit également servir de référentiel d’évaluation lorsque ces fournisseurs souhaitent démontrer leur conformité en se fondant sur ce mécanisme volontaire.
Dès le 30 septembre 2024, le Bureau de l’IA a réuni près d’un millier de participants issus de nombreux secteurs professionnels lors d’un événement inaugural qui témoignait de l’ampleur et de la transversalité des enjeux.
Trois versions successives ont ensuite été publiées : le 14 novembre 2024, le 19 décembre 2024 et le 11 mars 2025. La troisième mouture s’articule autour d’une liste synthétique d’engagements généraux en matière de transparence et de respect du droit d’auteur assortie de mesures détaillées destinées à faciliter leur mise en œuvre opérationnelle, auxquels s’ajoutent des engagements renforcés pour les modèles présentant un risque systémique élevé : évaluations approfondies, mesures d’atténuation des risques et reporting de sécurité. Elle prévoit notamment un modèle standardisé qui devrait accompagner chaque modèle d’IA à usage général afin de préciser ses capacités, ses limites et les caractéristiques essentielles des données d’entraînement.
En dépit de ces avancées, aucun texte consolidé n’a été présenté à la date butoir du 2 mai 2025. Si le Bureau de l’IA n’a pas fourni d’explication officielle, la presse spécialisée évoque des divergences majeures entre les différentes parties prenantes et l’opposition manifestée par certains acteurs industriels, qui ont soulevé des préoccupations relatives aux contraintes techniques et économiques liées à la mise en œuvre de certaines mesures proposées par le code de bonnes pratiques.
Dans un avis politique du 14 mai 2025, la commission des affaires européennes du Sénat a exprimé un « mécontentement généralisé » face au processus en cours. Elle critique la troisième version du code de bonnes pratiques pour son manque d’ambition, notamment sur la protection du droit d’auteur, et appelle la Commission européenne à faire preuve de fermeté face aux pressions de certains fournisseurs de modèles d’IA à usage général, afin de garantir une application rigoureuse du RIA.
Les conséquences de ce retard sont significatives pour les acteurs concernés, qui devront se conformer aux nouvelles obligations imposées à partir du 2 août 2025. À cet égard, l'article 56 du RIA prévoit explicitement que si aucun code de bonnes pratiques n’est publié d'ici le 2 août 2025, la Commission européenne pourra adopter des actes d’exécution pour définir un cadre commun pour l’application des obligations incombant aux fournisseurs de modèles d’IA à usage général.
Dans ce contexte, l’on peut légitimement s’interroger si les différentes parties prenantes parviendront à surmonter leurs divergences et à publier, avant le 2 août 2025, un code de bonnes pratiques constituant un consensus de place, ou si la Commission se verra contrainte d’imposer un cadre uniforme par voie d’acte d’exécution.
En tout état de cause, si les obligations substantielles du RIA s’appliquant aux fournisseurs de modèles d’IA à usage général entreront en vigueur très bientôt, les dispositions de l’article 101 relatives aux amendes applicables ne seront, quant à elles, effectives qu’à compter du 2 août 2026.