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Loi macron : le grand retour des actions gratuites !

Article Private Equity Gestion patrimoniale Droit fiscal | 03/06/16 | 5 min. | Xavier Rohmer Emilie Lecomte

La Loi n°2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « Loi Macron », adoptée par l’Assemblée nationale le 10 juillet 2015 après des débats tumultueux, et publiée enfin le 7 août 2015, a notamment porté simplification des conditions de mise en place et allègement des modalités d’attribution et d’imposition des actions gratuites (AGA). La refonte de leur régime fiscal et social leur promet un nouvel avenir et un nouveau regain d’intérêt par leurs bénéficiaires dans un contexte d’insécurité des « management packages ».

I. Assouplissement de la procédure d’attribution

Du point de vue juridique, l’assouplissement majeur consiste à permettre aux bénéficiaires d’acquérir définitivement les titres et à leur permettre d’en disposer au terme d’une période d’acquisition d’une durée minimale d’un an (au lieu de deux ans minimum auparavant), l’existence d’une période de conservation n’étant par ailleurs plus obligatoire pour que le plan soit qualifiant. Toutefois, la durée cumulée de la période d’acquisition et de la période de conservation ne doit pas être inférieure à deux ans (au lieu de quatre ans auparavant).

Par conséquent, les nouveaux plans pourront prévoir par exemple une période d’acquisition d’un an, assortie d’une période de conservation de même durée ou bien une période d’acquisition de deux ans sans obligation de conservation, cela augmentant la liberté de gestion du salarié et permettant d’accélérer l’octroi de l’intéressement promis par l’entreprise lors du recrutement de managers.

II. Alignement du régime fiscal du gain d’acquisition sur le régime des plus-values mobilières et allègement significatif du coût social pour l’employeur

1. Concernant le régime fiscal

Une des mesures importantes prévues par la loi Macron est l’alignement du régime fiscal du gain d’acquisition sur celui des plus-values mobilières, et non plus sur celui des traitements et salaires.

Dès lors, les abattements applicables à la plus-value de cession des titres acquis, pourront permettre de réduire sensiblement l’imposition du gain d’acquisition, celui-ci restant par ailleurs imposable au barème progressif de l’IR au jour de la cession des titres (fait générateur d’imposition inchangé).

Ainsi, le gain d’acquisition, égal à la valeur de l’action au jour de son acquisition définitive, pourra être réduit :

(i) Soit de l’abattement général prévu par l’article 150-0 D du CGI, à hauteur de :

- 50% dans le cas d’une détention par le bénéficiaire d’au moins deux ans ;

- 65% dans le cas où les titres seront conservés pendant au moins huit ans ;

(ii) Soit de l’abattement renforcé pour cession de titres de PME communautaire de moins de dix ans (après application le cas échéant, pour les dirigeants de PME prenant leur retraite, d’un abattement fixe de 500 KEUR) prévu par l’article 150-0 D ter du CGI, à hauteur de :

- 50% dans le cas d’une détention par le bénéficiaire d’au moins un an et de moins de quatre ans ;

- 65% dans le cas d’une détention par le bénéficiaire d’au moins quatre ans et moins de huit ans ;

- 85% lorsque les titres sont détenus depuis au moins huit ans.

Le point de départ d’application des durées de détention ouvrant droit aux abattements sera à partir de la date d’acquisition des titres, date à laquelle les titres deviennent en principe cessibles.

Ainsi en pratique, des actions gratuites soumises à une période d’acquisition d’un an et détenues pendant deux ans à titre facultatif ou non par la personne intéressée ouvriront droit au bénéfice de l’abattement pour une durée de détention de 50% sur le gain d’acquisition et sur la plus-value de cession des actions.

2. Concernant le régime social

Là encore, une volonté d’assouplissement du régime social est notable, aussi bien au niveau du bénéficiaire que de la société employeur. En effet, la contribution sociale salariale de 10%, qui était prélevée sur le gain d’acquisition, est supprimée. Le gain d’acquisition ne sera plus soumis aux prélèvements sociaux de 8% dus sur les revenus d’activité mais sera soumis aux prélèvements sociaux dus au titre des revenus du patrimoine, au taux de 15,5% (la déduction fiscale de 5,1 points de CSG étant maintenue au titre de l’année de son paiement).

L’allègement est aussi significatif pour la société émettrice des actions gratuites, du fait de trois mesures :

- La diminution de la contribution sociale patronale, réduite de 30% à 20% ;

- Le décalage de l’exigibilité de cette contribution, au mois suivant la date d’acquisition définitive des actions gratuites et non plus lors de la mise en place du programme ;

- La modification de l’assiette de cette contribution: la possibilité d’appliquer la contribution sur la juste valeur des actions telle qu’elle est estimée pour l’établissement des comptes consolidés est supprimée. La contribution ne pourra désormais s’appliquer que sur la valeur, à leur date d’acquisition, des actions attribuées.

S’ajoute à cela l’exonération de contribution patronale (dans la limite, par salarié, du plafond annuel de la sécurité sociale, c’est-à-dire 38 040EUR pour 2015) octroyée aux sociétés satisfaisant à la définition de PME communautaires (moins de 250 salariés, chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 MEUR ou dont le total du bilan annuel n’excède pas 43 MEUR) et qui n’auront pas distribué de dividendes depuis leur création. Les ETI ainsi que les grandes entreprises restent exclues de cette possibilité d’exonération en raison du coût budgétaire correspondant et de leur capacité à attirer les talents par des rémunérations plus hautes que les PME.

Entrée en vigueur

Le nouveau dispositif ne s’applique qu’aux actions gratuites dont l’attribution a été autorisée par une décision de l’assemblée générale extraordinaire postérieure au 7 août 2015.

A ce jour, l’administration fiscale n’a pas encore publié ses commentaires sur cette réforme, dont la clarification de certaines modalités d’application serait bienvenue, en particulier concernant la coexistence potentielle de trois régimes fiscaux distincts (selon que l’attribution des actions gratuites a eu lieu avant ou après le 28 septembre 2012, ou bien postérieurement au 7 août 2015) ou encore sur l’application du nouveau régime issu de la loi Macron à des titres attribués sur délégation au conseil d’administration/directoire/président, postérieurement à la publication de la loi Macron mais en vertu d’une décision d’AGE antérieure à celle-ci.

Dans un contexte où l’administration fiscale a clairement déclaré la guerre aux «management packages», ce toilettage du régime fiscal et social des AGA offre désormais une sécurité très avantageuse. Paradoxalement, les fonds d’investissement demandaient aux managers de co-investir à risque leurs disponibilités personnelles mais ils pouvaient subir les foudres de l’administration fiscale française. Demain, ces mêmes managers recevront gratuitement des AGA, au régime sécurisé, mais sans prendre le moindre risque !

Xavier Rohmer, associé
Emilie Lecomte, avocat senior

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