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Jeux olympiques et paralympiques 2024 - Sanctions, enquêtes et contrôles

Article Droit du travail et de la protection sociale Résolution des litiges IT et données personnelles | 25/06/24 | 12 min. | Florence Chafiol Alexandra Antalis Boris Léone-Robin Olivier Attias Alfred Reboul

A l'approche des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, la France s'anime dans les préparatifs de cet événement mondial. Diverses administrations sont mobilisées pour assurer la sécurité et l'efficacité de ce rendez-vous d'envergure internationale. 

Cette édition spéciale consacrée aux "Sanctions, enquêtes et contrôles" vous propose une analyse détaillée et des préconisations pour mieux anticiper les contrôles susceptibles d'être menés avant, pendant et après les Jeux.

Dans le domaine du droit social : quels contrôles par l’administration sociale ?

Vacances d’été obligent, les mois de juillet et août sont habituellement assez calmes en termes de contrôles menés par l’administration sociale, qu’il s’agisse de l’inspection du travail ou encore de l’Urssaf. Mais cette année, les choses devraient être différentes. De fortes mobilisations de l’administration sont attendues, y compris avant l’ouverture officielle des Jeux olympiques, le 26 juillet prochain.

Comment devraient se dérouler ces contrôles ? Comment les anticiper ? Comment réagir ?

1. Quels contrôles ?

Les contrôles de l’Inspection du travail

Une circulaire de la direction générale du travail (DGT) datée du 19 mars 2024, relative à l’organisation du système d’inspection du travail dans le cadre des Jeux olympiques et paralympiques 2024 ainsi que les premiers retours dont nous disposons permettent déjà de mesurer l’étendue de ces contrôles.

Tirant les constats du précédent de la coupe du monde de rugby de 2023, l’inspection du travail estime qu’une « mobilisation forte » de ses services est indispensable, tant en amont des épreuves (notamment pour contrôler les phases de montage), que pendant et après celles-ci.

En pratique, s’ils devraient débuter à proximité des épreuves, la durée généralement constatée pour ces contrôles laisse penser qu’ils s’étendront en réalité sur plusieurs semaines, voire mois après les épreuves. Les Inspecteurs devraient procéder à des constats à la suite d’une visite inopinée effectuée pendant les Jeux tandis que les échanges de pièces et justificatifs se feraient ultérieurement pour ne pas perturber le bon déroulement de la compétition.

La DGT énumère les principaux thèmes sur lesquels les contrôles devraient porter. Il s’agit principalement, et sans que cette liste ne soit exhaustive :

  • Des règles de santé et de sécurité au travail, en particulier lors des montages et démontages des structures éphémères ;
  • Des décomptes de la durée du travail ainsi que des dépassements des durées maximales hebdomadaire et quotidienne de travail ;
  • Et bien entendu, le contrôle du travail illégal (absence de déclarations, recours à des statuts non-salariés, non-paiement des cotisations sociales, emploi illicite de travailleurs étrangers, travail des mineurs, etc.).


En lisant entre les lignes, on comprend toutefois que les contrôles devraient cibler plus particulièrement certains secteurs d’activité identifiés comme les plus à risques : la restauration, les entreprises de propreté ainsi que le secteur de la sécurité.

Si l’on peut anticiper qu’une grande partie des contrôles devrait se concentrer sur les entreprises de ces secteurs uniquement, celles qui sous-traitent tout ou partie de leurs activités en la matière pourraient être également indirectement visées, notamment du fait des obligations de vigilance pesant sur ces entreprises en tant que donneur d’ordre.

Les contrôles de l’Urssaf

L’Urssaf n’a pas communiqué officiellement sur les contrôles qui devraient être menés pendant les Jeux. Mais cela ne signifie pas pour autant que les inspecteurs Urssaf ne seront pas mobilisés pendant cette période.

Bien sûr, les contrôles classiques d’assiette ne devraient pas être très actifs cet été. Ce sont en revanche ceux liés aux situations de travail dissimulé qui devraient occuper les inspecteurs Urssaf. Ces contrôles devraient porter plus particulièrement sur :

  • Le respect de l’obligations de collecter les attestations de vigilance ;
  • le recours à tout statut alternatif au salariat (bénévoles, Freelance/indépendants, plateformes de mise en relation), pouvant selon les cas conduire à des requalifications de travailleurs en salariés ;
  • l’emploi de travailleurs étrangers détachés et, notamment le paiement de cotisations sociales en France à défaut de détachement ou situation de pluriactivité dûment justifiée. 

Ces priorités sont fixées de longue date : dans le plan national de lutte contre le travail illégal pour la période 2023-2027 présenté au printemps 2023, le gouvernement avait déjà indiqué souhaiter des Jeux « exemplaires » sur ce terrain.

2. Comment les anticiper ?


Afin d’appréhender ces contrôles plus sereinement, les employeurs peuvent dès à présent :

  • Procéder à des audits visant à s’assurer du respect des règles en matière de sécurité et santé des travailleurs ;
  • Mettre en place des règles de suivi du temps de travail ;
  • En cas de sous-traitance, s’assurer du respect de l’obligation vigilance. Pour toute opération de sous-traitance ou contrat commercial conclu avec un prestataire d’un montant supérieur à 5.000 euros HT, un document dit « attestation de vigilance » doit être sollicité. Faute de pouvoir produire ce document en cas de contrôle, les sanctions peuvent être lourdes : la solidarité financière peut être engagée, ce qui signifie que l’administration peut solliciter le paiement des cotisations et impôts non acquittés par tout co-contractant tenu responsable de travail dissimulé ;
  • Pour tout travailleur étranger : mettre en place des mesures visant à collecter les documents liés à l’autorisation de travail (pour les travailleurs hors UE) mais également les certificats « A1 » ou équivalent pour les travailleurs hors UE attestant d’un éventuel détachement ou maintien à un régime de sécurité sociale étranger.

Dans le domaine de données personnelles et cybersécurité :

Pendant plusieurs semaines, des dispositifs importants de sécurité vont être déployés en France. La mise en place de « laissez-passer numérique » ou d’habilitations d’accès et l’utilisation de caméras augmentées pour accéder à ou surveiller certaines zones sont autant de dispositifs qui vont nécessiter une collecte massive de données à caractère personnel. Cette collecte pouvant entrainer un risque pour les droits et les libertés des individus, la CNIL y a été sensible et a souhaité mettre les Jeux Olympiques au programme de ses thématiques prioritaires de contrôles pour 2024 (programme qu’elle définit chaque année afin d’orienter sa politique de contrôle).

Par ailleurs, la CNIL fait d’ores et déjà preuve d’une vigilante accrue s’agissant de (i) la sécurité des nombreuses données collectées et traitées du fait des Jeux Olympiques (puisque comme l’a indiqué l’ANSSI dans son Panorama de la cybermenace 2023, les Jeux olympiques et paralympiques de Paris offrent aux attaquants des opportunités supplémentaires d’agir), (ii) des finalités pour lesquelles ces données sont collectées afin de veiller à ce que seules les données nécessaires à la finalité poursuivie soient collectées et (iii) la durée de conservation des données.

De nombreux contrôles de la CNIL sont donc à prévoir pour s’assurer que toutes les garanties ont été prises pour qu’il y ait un équilibre entre la meilleure protection possible des individus et le respect des libertés publiques.

En outre, la CNIL procédera très certainement à des contrôles ciblés pendant la période des Jeux en cas d’événement anormal entrainant une atteinte aux données à caractère personnel ou en cas de plaintes déposées auprès de ses services par des individus s’insurgeant contre une atteinte importante à leurs libertés individuelles. Cela pourrait être le cas s’agissant de l’usage de caméras et drones intégrant des systèmes d’intelligence artificielle qui seront déployés pour détecter les comportements anormaux dans l’espace public et filmer l’espace public. Pour rappel, de nombreux contrôles (80 en 2023) ont lieu chaque année à la suite de dépôts de plaintes.

En matière de dispositifs judiciaires : Revue des dispositifs et aménagements

À l'occasion des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, un corpus réglementaire ad hoc a été mis en place pour garantir le bon déroulement de cet événement mondial. Ayant en tête la mauvaise expérience de la finale de la Ligue des champions au Stade de France en mai 2022, où des incidents de sécurité ont terni l'événement, les autorités françaises ont voulu se doter de mesures robustes pour prévenir toute répétition de tels incidents. Voici une synthèse des dispositifs et aménagements significatifs adoptés à ce jour.

Dispositif judiciaire pour les Jeux Olympiques et Paralympiques

Le 15 janvier 2024, une circulaire relative au dispositif judiciaire pour les Jeux Olympiques et Paralympiques a été publiée. Plus concrètement, cela signifie :

  • Renforcement des effectifs : Entre janvier 2023 et juin 2024, 122 magistrats et 294 greffiers auront été affectés dans les 17 juridictions concernées, dont 60 magistrats et 185 greffiers pour les juridictions de la cour d’appel de Paris. En surnombre, 70 magistrats (47 au siège et 23 au parquet) et 37 greffiers ont été nommés. Pour la cour d’appel de Paris, cela inclut 23 magistrats et 30 greffiers, dont 11 magistrats et 9 greffiers pour le seul Tribunal de Paris.
  • Traitement réactif des demandes d'accréditation : Les parquets doivent traiter de manière fluide et réactive les demandes d’accréditation, y compris en urgence.
  • Collaboration avec les autorités préfectorales : Une collaboration étroite entre procureurs et autorités préfectorales est requise pour identifier les épreuves et sites à risques, et assurer une gestion sécuritaire efficace.
  • Intervention rapide des forces de sécurité et unités médico-judiciaires : Les forces de sécurité et les unités médico-judiciaires devront être prêtes à intervenir rapidement en cas d’urgence.
  • Politique pénale adaptée : Nécessaire pour gérer les auteurs et victimes d’infractions, particulièrement les étrangers, et inclut des mesures de prévention contre les cyberattaques et une coopération renforcée avec le parquet national antiterroriste.

 

Loi n° 2023-380 du 19 mai 2023

La loi n° 2023-380 du 19 mai 2023, amendée au Parlement, prévoit plusieurs dérogations et expérimentations pour permettre le bon déroulement des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, qui se tiendront du 24 juillet au 8 septembre 2024. Ces mesures complètent celles adoptées dans le cadre de la loi du 26 mars 2018 relative à l'organisation des Jeux de 2024. Parmi les principales mesures :

  • Vidéosurveillance intelligente : Utilisation d’IA pour détecter les comportements suspects.
  • Coordination des forces de sécurité : Extension du champ des images de vidéoprotection visibles par les agents de la RATP et de la SNCF.
  • Compétences du préfet de police : Le préfet de police de Paris sera le responsable unique de l’ordre public en Île-de-France pendant les Jeux.
  • Procédure de criblage : Étendue aux fan zones et aux participants aux grands événements.
  • Scanners corporels : Introduction de scanners corporels à l’entrée des stades et autres enceintes sportives.
  • Interdictions judiciaires de stade : Rendues plus systématiques pour prévenir les violences lors des manifestations sportives.
  • Billets nominatifs : Obligation pour tous les spectateurs d'être munis d'un billet d'entrée, avec des billets nominatifs pour les grandes manifestations sportives.
  • Lutte contre le dopage : Nouvelles techniques autorisées de manière permanente dans le code du sport, incluant des tests génétiques sur les prélèvements sanguins ou urinaires des sportifs.
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